Sunday, December 18, 2005

Postcards



I

Outwards

A Francis Jammes

L’Armand-Béhic (des Messageries Maritimes)
File quatorze noeuds sur l’Océan Indien...
Le soleil se couche en des confitures de crimes,
Dans cette mer plate comme avec la main.

— Miss Roseway, qui se rend à Adelaïde,
Vers le Sweet Home au fiancé australien,
Miss Roseway, hélas, n’a cure de mon spleen;
Sa lorgnette sur les Laquedives, au loin...

— Je vais me préparer – sans entrains! – pour la fête
De ce soir: sur le pont, lampions, danses, romances
(Je dois accompagner miss Roseway qui quête

— Fort gentiment – pour les familles des marins
Naufragés!) Oh, qu’en valse lente, ses reins
A mon bras droit, je l’entraine sans violence

Dans un naufrage où Dieu reconnaîtrait les siens...



II

British India

A Rudyard Kipling

Les bureaux ferment à quatre heures à Calcutta;
Dans le park du palais s’émeut le tennis ground;
Dans Eden Garden grince la musique épicée des Cipayes;
Les equipages brillants se saluent sur le Red Road...

Sur son trône d’or, étincelant de rubis et d’émeraudes,
S.A. le Maharadjah de Kapurthala
Regrette Liane de Pougy et Cléo de Mérode
Dont les photographies dédicacées sont là...

— Bénarès, accroupie, rêve le long du fleuve;
La Brahmane, candide, lassé des épreuves,
Repose vivant dans l’abstraction parfumée...

— A Lahore, par 120 degrés Fahrenheit,
Les docteurs Grant et Perry font un match de cricket, —
Les railways rampant dans la jungle ensoleillée



III

Homewards

A M.P. Bons d’Anty

Au Waterloo Hotel, j’ai achevé mon tiffin,
Et mon bill payé, je me dirige vers le wharf.
Voici l’Indus (des Messageries Maritimes)
Et la tristesse imbécile du ‘homewards’.

— Quelques officiers français qui reviennent de L’Indo-Chine
Passer en Europe un congé de six mois,
Commentent l’embarquement de jeunes misses, assez divines,
Avec lesquelles je ne flirterai certes pas!

Sur le pont mes futurs compagnons de voyage
Me dévisagent...
Puis on passe une sommaire visite de santé –

(Cette année la peste a fait ici bien des ravages!)
— Enfin voici la cloche du départ, qui sonne
Que je ramène, pieusement ouatée,

La fleur de ma mélancholie anglo-saxonne.

-- Henry J.-M. Levet (1874–1906)
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